César 2018 : le scénario d’anticipation

 

Vendredi 2 Mars 2018. Une foule de personnalités prestigieuses afflue à la salle Pleyel pour applaudir les plus grands talents de leur formidable profession : le Cinéma.

21h : Dix minutes avant le levé de rideau, la nouvelle tombe : Manu Payet est bloqué entre les stations Charles-de-Gaulle-Etoile et Ternes ne peut assurer l’animation de la soirée. Dans l’agitation et la confusion provoquées par cette épouvantable nouvelle, un stagiaire tend un micro à Nils Arestrup qui sortait à ce moment-là des toilettes. Pendant trois heures, le vieil homme va lire d’une voix monocorde les vannes écrites par Manu Payet. Le silence de l’assistance est glacial. Des gens meurent d’effroi dans la salle. Des corbeaux volent au-dessus du public en poussant des coassements terrifiants. Le pronostic vital du cinéma français est engagé.

21h12 : Le nouveau maître de cérémonie n’ayant pas apporté ses affaires de sport, le court spectacle de claquettes qui avait été prévu par Manu Payet est finalement annulé. A la place, Nils Arestrup décide de clamer, au débotté, un acte de Britannicus de Racine. La fête bat son plein.

21h23 : Seulement quatre gros malaises ont été recensés pour le moment.

21h47 : Seulement 7 César pour 120 battements par minute ont été recensés pour le moment.

21h53 : Carole Bouquet, dans une magnifique robe fourreau Dior mettant en valeur sa splendide silhouette, interpelle la Ministre de la Culture sur le sort des intermittents. Elle menace de mettre en vente son hôtel particulier du 16ème arrondissement de Paris pour s’installer au Luxembourg si désormais, sur les tournages, les plateaux-repas des équipes techniques ne sont pas bio.

22h03 : Catherine Deneuve, dans une magnifique robe fourreau Dior mettant en valeur la qualité des plateaux-repas sur les tournages, vient remettre le prix du meilleur espoir féminin 2018 en glissant dans son discours un très bel hommage à Roman Polanski et à Woody Allen. Isabelle Huppert esquisse un rictus. Le cadreur qui capte par hasard et par mégarde cette rare expression faciale meurt instantanément.

22h37 : Fin du discours du meilleur espoir féminin 2018.

22h48 : La cérémonie se dote cette année d’une innovation technique inouïe : plutôt que de faire se lever toutes les personnes assises dans leur rangée à l’appel de leur nom, les lauréats sont désormais transportés sur scène à l’aide d’un bras articulé qui vient directement les saisir à leur place et les dépose derrière le pupitre. Après l’avoir précautionneusement déposé, le robot, par mégarde, repart en gardant dans sa pince le pantalon et le slip de Daniel Auteuil récompensé pour son rôle dans Le brio. L’occasion de s’apercevoir que malgré les normes en vigueur, la salle ne dispose que de deux défibrillateurs.

 

Et le prix est décerné à…. Sara Giraudeau dans Petit paysan *code pour Sara Giraudeau : M96*

 

22h49 : La soirée est un désastre. Le bilan s’élève déjà à 19 morts et 47 blessés graves.

22h56 : Jean-Louis Trintignant reçoit un César d’honneur, qui était à l’origine destiné à Penélope Cruz. Une semaine avant la cérémonie, l’Académie a en effet décidé de récompenser la carrière de l’acteur français plutôt que la belle ibère. Depuis que la nouvelle a été publiée, le docteur Bonnefoi, médecin traitant de l’acteur, est harcelé jour et nuit par les journalistes qui s’enquièrent de l’état de santé de M. Trintignant. Ce dernier reçoit la statuette d’une main émue mais néanmoins ferme, rassurant ainsi ses fans. Penélope Cruz s’est sûrement trouvé une excuse de dernière minute pour ne pas venir en fait.

23h07 : Nils Arestrup craque et fait une blague de cul.

23h12 : Premier César de la soirée à ne pas être attribué à 120 battements par minute : celui du meilleur film d’animation.

23h24 : Remise du César pour le meilleur court-métrage. Le cinéma français, unanime, se sent extrêmement concerné par la scolarisation des enfants au Congo.

23h31 : N’ayant fait aucun film cette année (les précédents ayant suffi à renouveler son statut d’intermittent), Jacques Audiard ne reçoit que son 8ème César de la soirée.

23h38 : Tout le monde se dit que cette cérémonie est vraiment trop longue. Nils Arestrup a commandé un verre de blanc et une bourriche d’huîtres. Il ne prend même plus la peine d’enlever son bavoir quand il revient sur scène.

23h53 : Devinez qui reçoit le César du meilleur film ?? Seul, le producteur de 120 battements par minute vient chercher son César tandis que toute l’équipe du film est déjà partie fêter ses victoires dans le bar le plus proche.

00h11 : Le trafic est rétabli sur la ligne 2. Merci d’avoir patienté. Veuillez nous excuser pour la gêne occasionnée.

Une réflexion au sujet de « César 2018 : le scénario d’anticipation »

Les commentaires sont fermés