Merci à Mathieu Lourdot, qui nous a proposé ce texte.
Un dimanche ordinaire, comme celui où Dieu après avoir trimé 6 jours pour créer la terre décida de se planter dans son canapé une Corona à la main et de rien glander, un Japonais alluma la télé et tomba sur un grand prix de F1. Il sombra dans un profond sommeil parce que la F1, c’est quand même très chiant passé le premier virage. Il rêva d’une course de voiture où les pilotes pouvaient se balancer des peaux de bananes ou des carapaces et il trouva le concept super rigolo. Ainsi était né Mario Kart.
C’est un peu ce qui advint lorsque qu’un Français, zappant sur France 2, tomba sur une étape du Tour de France bien purgesque (genre entre Sedan et Tourcoing ou toute autre ville du Nord ou de l’Est de la France) un après-midi de juillet. Il eut à peu près la même idée que son comparse Japonais et il inventa le Cyclo-Cross.
Même si son idée parut un peu bizarre au début, certains grands champions cyclistes se prirent au jeu et meublèrent leurs longues après-midis d’hiver en participant à ce type de courses, ce qui permit à la discipline d’acquérir une petite renommée.
Le Cyclo-cross Kesseussé ?
- Trouvez un petit village en pleine campagne (s’il est belge, c’est encore mieux) avec un nom imprononçable.
- Déterminez le point culminant aux environs de ce petit village. Il peut s’agir d’une colline, une dune, une butte, un mont. Dans le cas où il n’y a pas de relief, trouvez simplement un pré ou un bois.
- Tracez un petit parcours à travers champs empruntant la fameuse colline/butte/dune/mont sur des surfaces aussi variées que de la boue, du sable ou des pavés mais surtout pas de bitume. Pour bien rigoler, il faut que ce parcours soit bien humide, voire gelé, avec des virages capables de provoquer un AVC chez Sébastien Loeb.
- Comme c’est encore un peu facile, ajoutez quelques obstacles : planches, bacs à sables, escaliers, pneus, tessons de bouteille, clous, mines antipersonnel…
- Mettez quelques barrières pour la sécurité du public (un cycliste qui saute sur une mine, ça en fout partout et ça peut faire mal).
- Attirez un troupeau de Belges sur le parcours. Rien de plus simple, louez un Barnum, une tireuse à bière et prévoyez quelques fûts de bière d’Abbaye. Si le site choisi est situé dans un triangle Reims/Düsseldorf/Groningen, ils viendront à vous naturellement.
Un « passage de planche »
Félicitations ! Vous avez maintenant un vrai parcours de cyclo-cross.
Jusque-là, ça ressemble à une course de VTT (sauf les Belges bourrés).
Ce qui différencie cette discipline d’une vulgaire course de VTT, c’est que les coureurs utilisent des vélos de route modifiés. Ces vélos ont des pneus plus larges et crantés que ceux utilisés sur la route, et des freins à disque pour éviter qu’ils ne se remplissent de boue. Le cyclo-cross est une discipline d’intersaison, c’est-à-dire qu’il se pratique au moment où on retrouve Jan Ullrich ivre mort à l’Oktoberfest et la Team SKY en plein stage de préparation « physique » dans le manoir du Docteur Ferrari.
A la différence des courses sur route qui peuvent se montrer assez chiantes, on ne s’ennuie pas en regardant du cyclo-cross. Ici pas d’équipe SKY pour contrôler la course.
Les sets sont relativement courts (50 minutes maxi pour les Elites Hommes, 20 minutes pour les jeunes) et particulièrement intenses. Enfin, il n’est pas rare que le circuit soit gelé et là c’est jackpot : les coureurs se vautrent dans tous les sens et s’accrochent aux arbres pour prendre les virages. Bref, c’est une sorte de croisement entre un rallye automobile, un match de Top 14 et Brian Joubert.
Pour le spectateur au bord du parcours, c’est aussi super cool. Plutôt que de choper une insolation en plein mois de juillet pour attraper un bob Cochonou et apercevoir les coureurs durant 5 secondes, il pourra se poser au bord du parcours et voir passer des champions toute la journée. En effet, la plupart des cyclo-cross regroupent toutes les catégories (féminines et masculines), sur un même site et une même journée ce qui fait qu’on peut consacrer une journée entière à la buvette sans culpabiliser. De plus la ferveur du public est vraiment géniale pour peu qu’on aime porter des bottes en caoutchouc et qu’on maîtrise le Flamand bourré.
La saison de cyclo-cross s’articule autour de 4 challenges principaux :
Le Superprestige : C’est un peu Le Cyclo-Cross Vrai qui regroupe les épreuves les plus prestigieuses. Il se déroule exclusivement aux Pays-Bas et en Belgique.
Le Trophée des Assurances AP qui se court uniquement en Belgique avec des circuits souvent très difficiles et atypiques.
La Coupe du Monde qui est le challenge le plus international avec notamment des étapes en France, en Suisse, en République Tchèque ou aux États-Unis.
Le Chimay afdaling trophee : où il faut suivre un peloton de belges à la buvette. Un trophée qui récompense les athlètes les plus techniques.
Enfin la saison est aussi marquée par les Championnats du Monde qui se jouent sur une course unique. Il est à noter que le vainqueur de la course aura le privilège de porter un maillot trop classe avec un arc-en-ciel (mais pas de licorne malheureusement) pendant une année entière. Outre l’aspect esthétique, ce maillot est particulièrement utile pour éviter de se prendre une balle lorsqu’on s’entraine en sous-bois en période hivernale.
Instant prévention offert par le syndicat des ophtalmologistes du Brabant Septentrional : si tu vois un sanglier sur cette image, il te faut de bonnes lunettes.
Le champion belge a gagné environ 300 courses dans sa carrière. Son palmarès sur route reste assez anecdotique. L’hiver venu, alors que Lance Armstrong se posait sur une plage de Lloret del Mar pour s’injecter une petite margarita avec le sentiment du devoir accompli, Sven courait les sous-bois et bâtissait ses plus grands succès. Sa longévité n’eut d’égale que sa soif de victoire car il domina la discipline durant plus de 20 ans. Il a réussi l’exploit de remporter 8 fois la course qui porte son nom ce qui est très fort, surtout quand on sait que les courses sont nommées d’après des coureurs morts. Sur ses dernières années, il a notamment bénéficié de l’arrêt de ses principaux rivaux, tous plus jeunes que lui. Niels Albert (Belgique), son héritier, a pris sa retraite à 28 ans à la suite de problèmes cardiaques, et Lars Boom (Pays-Bas) et Zdenek Stybar (République Tchèque) se sont orientés vers la route avec succès.
Le grand Sven
Depuis la retraite de Sven Nys, la discipline vibre pour le duel entre le Belge Wout Van Aert et le Néerlandais Mathieu Van Der Poel. Ce dernier est le fils d’Adrie Van de Poel qui connut une belle carrière de cycliste et petit-fils de Raymond Poulidor, vendeur de conventions obsèques. WVA et MVDP (pour les intimes) dominent la discipline depuis leur plus jeune âge et s’essaient même à la route ou au VTT avec un certain succès.
On m’a demandé de mettre une conclusion mais j’en ai pas alors je laisse le mot de la fin à Sven Nys :
Allez ! Salut
On a aimé :
- Porter des bottes en caoutchouc sans ressentir la moindre gêne.
- La bière
- Les Belges
- Les gamelles
On n’a pas aimé :
- Ça manque quand même de combats de catch d’autant que le terrain s’y prête.
- La langue flamande.
- Le fait que la discipline soit dominée par des pays qui existent simplement en tant que faire-valoir de la France, comme si Robin inventait une nouvelle discipline pour piquer la vedette à Batman.
Non, ils n’utilisent pas de freins à disques mais cantilever. Regardez vos photos!