Les Filles du Dr March (Little Women), de Greta Gerwig (2020)
“On ne peut s’opposer à la volonté de Dieu
– Dieu ne s’est pas encore frotté à la mienne”.
Notation
Jeunes filles en fleur : ++++
Méchante sorcière : +
Voisin riche Charmant : +
Animaux qui parlent : ——
Disney : –
Synopsis :
Nord-Est américain, en pleine guerre de Sécession. Quatre sœurs, dont le père est au front, tracent leur voie vers l’avenir, chacune guidée à la fois par ses passions individuelles ainsi que par les liens familiaux. Et mine de rien, naviguer entre le mariage, le travail, les ambitions artistiques, la maladie, les enfants, l’amour et l’aide aux plus pauvres, ça n’a rien d’évident quand on est une femme vers 1865, soit l’équivalent juridique d’un cheval de trait.
Le colonel Moutarde, avec le chandelier, dans le salon de thé ?
Les + :
- La VO. Ca vous permettra de vous la péter en utilisant “Little Women”, le titre d’origine, parce que la traduction est un peu pourrie. Bonus : vous admirerez la galère dans laquelle Greta Gerwig plonge deux Anglaises, une Irlandaise et une Australienne en les faisant adopter l’accent américain.
- Le casting féminin, impeccable. Bon, elles sont toutes magnifiques et ça peut être énervant, mais tout est si juste qu’on leur pardonne les dentitions parfaites et les peaux saines. Mention spéciale à Meryl Streep, que tout le monde déteste dans le film alors que c’est totalement la vieille tante indigne, riche et désabusée qu’on aimerait tous avoir.
- L’avantage d’adapter finement un bouquin qui a traversé les âges, c’est l’assurance que peindre le portrait de 4 filles différentes (sans compter la tante et la mère) permettra à n’importe quelle audience de s’identifier aux protagonistes, même si on n’a ni leurs talents, ni leur répartie, leur intelligence ou leur beauté. Et surtout, ça vieillira mieux que Sex & the City ou Desperate Housewives.
- Après avoir été une représentation de Louisa May Alcott, auteure du bouquin d’origine, Jo Marsh fait figure d’avatar de Greta Gerwig dans ce film. Ce type de transfert est courant, mais ça reste plaisant de voir quelqu’un d’autre que Nicolas Bedos, Woody Allen ou Guillaume Canet utiliser ce procédé.
- Meryl Streep, très convaincante dans son imitation de Maggie Smith dans Downton Abbey.
- Un film entier qui dit via plusieurs personnages qu’une femme devrait pouvoir espérer être autre chose qu’un simple objet d’amour ou de mariage, ça a beau être dans l’air du temps, ça fait plaisir. Même Bridget Jones n’avait pas osé.
Les – :
- Encore un film dans lequel Saoirse Ronan est fière, impulsive, éprise de liberté, et court de profil dans de longs plans métaphoriques de son approche de la vie. Ca finira par lasser.
- Florence Pugh ne fait pas de catch, et c’est bien dommage. D’autant qu’on sent bien qu’elle a souvent envie de mettre en application ce qu’elle a appris pour Fighting with my Family en tapant tout le monde.
- Une scène où on se sent mal pour Timothée Chalamet, c’est toujours un moment compliqué à expliquer à sa propre conscience. Un peu comme d’avoir trouvé Benjamin Biolay sexy dans Au Bout du Conte d’Agnès Jaoui (et non, je ne veux pas en parler).
- Louis Garrel, dont le personnage arrive un peu comme un cheveu sur la soupe, qu’on voit à peine et qui souffre d’un ténébreux manque de charisme doublé d’un accent épouvantable.
- C’est complètement con de vouloir jouer au badminton sur une plage avec le vent qu’il y a.
- La mère parfaite a beau être jouée par Laura Dern, on a du mal à y croire.
- Un film entier qui dit via plusieurs personnages qu’une femme devrait pouvoir espérer être autre chose qu’un simple objet d’amour ou de mariage, pour finir par toutes les voir heureuses car mariées, c’est un peu contre-productif. Et dommage.
C’est l’amour à la plage… Ahoum tchatchatcha
Le saviez-vous ?
- Le film se déroule sur deux lignes temporelles différentes. Ca pourrait être gênant, mais une fois qu’on a vu the Witcher, ça passe crème.
- La ville de Concord, Massachussetts, où se déroule l’essentiel de l’histoire, est jumelée avec Saint-Mandé, en région parisienne, qui a vu naître Marc Jolivet et Eric Serra. Cocorico ?
- Un film de Greta Gerwig avec Timothée Chalamet et Louis Garrel se classe d’office dans la catégorie porno au festival de Sundance.
- On les appelle les filles du Docteur March, mais leur père est pasteur. Rien à voir, donc. Vous pourrez désormais frimer dans les dîners pendant que Christine Boutin crie à la christianophobie.
Les conditions idéales pour voir ce film
En famille, si vous en avez une, en vie, et que vous n’êtes pas trop trop fâché(e) avec.
Ce qu’il faut en retenir
- Être égoïste, c’est pas top, surtout si on n’a pas de fortune personnelle, et qu’on galère un peu à savoir ce qu’on veut dans La Vie©.
- La solitude, c’est pas top non plus.
Si vous avez aimé le film, vous n’aimerez pas :
- Les traductions cheloues de titres vers le français.
- Le patriarcat, en particulier au 19e siècle.
- Le mariage.
- La scarlatine.
Figurez-vous qu’à l’époque, c’était déjà Jean-Pierre Foucault qui posait les questions aux Miss aspirantes.
Si vous avez aimé le film, vous aimerez :
- Vous rabattre sur la petite sœur de votre grand amour.
- Relire le bouquin pour comprendre ce que vous aviez loupé la première fois.
- Lire le bouquin parce que dans vos souvenirs (et la série animée japonaise qui passait sur la Cinq) tout ne se passait pas comme ça.
Si vous n’avez pas aimé le film, vous aimerez :
Relire le bouquin pour repérer les changements et attaquer le film sur les réseaux sociaux en blâmant le mouvement #MeToo et autres émergences féministes d’avoir souillé une œuvre littéraire immuable pour entretenir un agenda. Vous êtes probablement Eric Zemmour, allez-vous en s’il vous plaît.
Appréciation de mes 2 fils en sortant de la séance: « pas mal ». Greta Gerwig est trop forte parce que arriver à leur faire apprécier un film avec que des filles, où aucune n’est habillée en combinaison moulante pour mettre la raclée à des méchants, ben c’était pas gagné.
Moi je ne connaissais pas l’histoire(jamais lu le livre) et j’ai aimé. Le casting est parfait (Laura Dern serait dans la vraie vie la mère de Saoirse Ronan que ça ne m’étonnerait pas). L’accent bien frenchy de Louis Garrel ne m’a pas choqué plus que ça vu qu’il joue un immigré. En revanche son manque de charisme se remarquait d’autant plus que Saoirse Ronan est vraiment éblouissante. Mais bon, c’est pas souvent le cas dans la vraie vie? Les personnes brillantes et/ou qui aiment briller sont attirées par d’autres plus ternes qui n’ont pas d’autre choix (ou l’envie) que de rester dans l’ombre et/ou de les admirer.
En 2020, pour la sortie de ce film, on aurait pu laisser tomber ce mauvais titre « Les quatre filles du Docteur March » pour revenir à l’original. Occasion ratée.