Parmi les nombreux débats qui animent une France plus crispée que jamais, il y en a un particulièrement violent : faut-il aimer Kaamelott ? Alexandre Astier est-il un génie ? Est-il de droite ? Si oui, est-ce grave ? Surtout, est-ce que les fans de la série ne sont pas un peu des gros relous ?
Chez l’Arrière Cuisine, on a décidé de donner la parole à l’un d’eux, Pyody, et de lui demander son avis sur le film Kaamelott, qui cartonne au cinéma mais divise les avis des cinéphiles. Dans cette tâche il est accompagné par Riwan, qui apprécie la série mais sans aller jusqu’à idolâtrer son créateur démiurge ou faire la queue 8h devant une FNAC pour avoir sa signature sur une bande dessinée qu’il ne lira jamais.
Je suis un fan de Kaamelott. Pas du genre à porter un t-shirt « On en a gros » lors des concerts de métal, mais bon, quand même un fan. Du genre intégriste. Qui a dû voir la série en entier 5 ou 6 fois et qui du coup connaît par cœur toutes les répliques jusqu’au moindre détail. En même temps, ça c’est aussi parce que je glandouillé des heures sur la page Wikiquote de la série. Un lourdingue, capable de passer un week-end à ne communiquer qu’avec ces fameuses citations Kaamelott qui pourrissent la vie des non-initiés. Qui trouve qu’il n’y a pas assez de gifs de Kaamelott disponibles pour répondre sur Twitter.
Une espèce de taré qui ne supporte pas que ses potes disent « On rigole, on rigole… », croyant faire référence à Léodagan (Livre I, épisode La Tarte aux Myrtilles), parce que la réplique exacte c’est « On plaisante, on plaisante… ». J’ai même un jour repris ma femme qui faisait une citation correcte mais pas avec la bonne intonation sur la phrase. Un gros psychopathe.
Et snob avec ça. Le prochain qui me dit en rigolant « Ah ah, t’aime Kaamelott. Ah, ben c’est pas faux alors ! ». Je lui mets une grosse tarte dans sa mouille. J’ai même assisté à une conférence très sérieuse à la Sorbonne où de vrais historiens dissertaient sur les liens entre la série et la réalité des connaissances historiques. C’est là que j’y ai appris par exemple qu’on pouvait trouver en illustration des manuscrits écrits par des moines des images de chevalier à poil sur des escargots. Et plus exactement, vu la bassesse des attaques et des questions en fin de conférence, je pourrais, paraphrasant Goustan de Carmélide affirmer que « Alors c’est ça, la recherche historique moderne ? Réunir cinq trous-de-balle en cercle et s’balancer des fions ? »
Bref, quand je me suis pointé, pass sanitaire en poche, moi qui ne vais jamais au cinéma, pour aller voir Kaamelott premier volet, autant vous dire que mon attente était démesurée. Et que je m’attendais à être forcément un peu déçu. Ben c’était pas faux.
De quoi ça parle :
Depuis la fuite d’Arthur, le royaume de Logres est sous la coupe de Lancelot qui fait régner la terreur grâce à l’aide de mercenaires saxons. Une intervention divine va faire revenir celui que tout le monde croyait mort et ça va chier. Enfin c’est pas sûr par ce qu’il a toujours un peu la flemme et pas spécialement envie.
Les points forts :
- On est content de retrouver les personnages qu’on aime bien.
- On est contents de retrouver la plume d’Astier sur les dialogues. D’autant plus qu’il ne s’est pas (trop) laissé allé au fan service, n’en déplaise aux fans qui attendaient fébrilement le « C’EST PAS FAUX » de la part de Perceval.
- La bande originale, également signée par Astier, qui aime beaucoup John Williams, et ça s’entend un peu.
- C’est un point qui divisera selon les goûts, mais les costumes sont assez originaux et réussis. Enfin plus exactement, oui, certains sont moches, mais ils ont une vraie utilité. Si Lancelot porte un costume inconfortable, ridicule et trop grand pour lui, il y a peut-être une raison. Mention spéciale pour les Burgondes sapés chez Desigual.
- La fin du film tease quelques éléments intrigants et on a envie de voir la suite.
- Les vues magnifiques des paysages et châteaux d’Auvergne-Rhone-Alpes (Murol, Mont Mézenc, Bressieux). Toujours eu la trouille de voir Wauquiez débarquer à un moment, il aurait été parfait en chevalier renégat.
- Même si tout n’est pas réussi, on a quand même un film d’heroic fantasy français dans les cinémas, donc allez-y, peut-être que ça encouragera des gens à financer plus de films de ce genre.
- Ils s’étaient peut-être sentis exclus par des productions comme Space Jam 2 et Fast and Furious. Enfin, voici un blockbuster estival pour les blancs à queue de cheval qui portent des t-shirt de groupe de métal.
- Sting. Tout comme nous il a l’air de se dire « je ne sais pas ce que je fous là, mais c’est cool ».
- Alain Chabat.
Les points faibles :
- Ca fait des années qu’on nous parle de ce passage sur grand écran, et on pouvait rêver d’un peu plus d’ambition cinématographique. Malgré quelques décors dépaysants et des effets spéciaux pas honteux, on a l’impression de regarder un téléfilm du même calibre que les livres V et VI.
- On sent que le film a été tourné pour faire 2h40, et qu’il a été monté pour ne durer que 2h15. Donc tout va très vite. Point positif : c’est rythmé et on ne se fait pas trop chier. Point négatif : les péripéties s’enchaînent, les ellipses et les téléportations aussi. Sans laisser les personnages et le récit respirer, et sans nous impliquer et nous aider à comprendre les motivations et les enjeux de ce qui se passe à l’écran.
- Le côté réunion de famille fait certes plaisir, mais entre des personnages bien connus qui font coucou deux minutes et qui ne servent à rien, et des nouveaux venus qui disparaissent au bout d’un quart d’heure, tout le monde n’est pas très bien servi.
- On ne comprend pas forcément l’utilité de certains flashbacks, d’autant que la jeunesse d’Arthur dans la légion romaine a déjà fait l’objet d’une saison entière et que tout semblait y avoir été raconté.
- Niveau trucs longs et inutile, je n’étais déjà pas particulièrement client des jeux abscons de Perceval dans la série, mais la partie de Robobrole on est encore un niveau au-dessus. Alors que les sports d’équipe, britanniques, absurdes et violents, c’est plutôt mon truc en général, j’aime le rugby.
- Perceval et Karadoc uniquement réduits à leurs rôles de bouffons et qui passent leur temps à gueuler. C’est plus lourd que marrant, surtout pour Karadoc qui laisse libre court à son autoritarisme et à sa vanité, et c’est presque une régression pour Perceval, qui montrait parfois des facettes plus attachantes dans la série.
- Pour faire un bon film de ce genre, il faut généralement un bon méchant. Là, on a un peu de mal à comprendre en quoi ce Lancelot dépressif qui se fait bolosser par toute la cour de son château représente une quelconque menace. D’ailleurs, une confrontation longuement attendue se conclut en bon vieux pétard mouillé.
- Le film risque de laisser complètement hermétique (au bûcher !) ceux qui ne connaissent pas la série, ou qui n’ont consommé que les épisodes courts rediffusés à l’infini sur les chaînes de la TNT.
Le saviez-vous :
- En faisant jouer tous ses enfants dans son film, Alexandre Astier a totalement compris le fonctionnement du cinéma français.
- Astier écrit le scénario, les dialogues, la musique, réalise, met en scène, incarne le personnage principal, monte et ne confie les rôles clés qu’a des amis proches ou des membres de sa famille. En règle générale, on appelle ça un manager toxique, mais bon vu qu’il est doué, ici on peut dire que c’est un génie.
- Le film est bourré de références à d’autres films dont Astier est fan, en particulier à Star Wars. Mais pas seulement, à vous de trouver. (J’en ai personnellement trouvé une à Holy Graal, j’en suis assez fier).
Les conditions idéales pour voir ce film :
- Avec un pass sanitaire
- Sans fans de la série dans la salle.
Si vous avez aimé Kaamelott Premier volet, vous aimerez aussi :
• Le revoir plus de 200 fois, comme ce fan qui se fait insulter sur les réseaux sociaux alors qu’il contribue à sauver les cinéma français dans cette période compliquée.
• Les livres I à VI de la série
• Tout ce que fait et dit Alexandre Astier. Même quand il passe chez Morandini.
• Etre lyonnais. Depuis que l’OL ne gagne plus un titre, faut bien quelques fiertés.
Ce qu’il faut en retenir :
Le mythe de l’homme providentiel qui sait qu’il est entouré de cons mais qui revient quand même pour sauver la patrie après des années à vivre retiré du monde, c’est vraiment un truc qui plait aux Français. On peut donc encore rêver pour Lionel Jospin.
Rien que pour la forme grammaticalement correcte de « Une espèce de taré » j’aime ce résumé.
Totalement d’accord pour Wauquiez. Brrr….
Bonjour, bien bien sympathique votre site. L’arrière cuisine c’est l’endroit où l’on est le mieux. Donc Kaamelott je suis entièrement d’accord avec vous, le problème, bon j’aime bcp Alexandre Astier, théâtre et cinéma mais à force de tout faire… Je pense qu’au.niveau montage il devrait être un poil plus souple, je ne se sais pas à quel point il est aidé mais à force de tout contrôler, Au moins c’est comme Lucas g c’est son film, son histoire mais papy Georges a eu la très bonne idée de laisser à d’autres réalisateurs….et pourtant c’est son bébé. Bon c’est mon Avis , Bonne continuation, je vais continuer à aller dans l’arrière cuisine.