Préambule :
« Il n’est pas facile d’avoir 20 ans en 2020 » dit le poète, « ben pour les sportifs amateurs c’est pas top non plus », répond l’auteur de ces lignes. Une fois enfermé chez soi, les options sont minces, contrairement à vous-même dans quelques mois si vous ne trouvez pas une solution rapidement. Le programme Cardio X de Sissymua ne vous tente pas ? Vous n’avez pas la place dans votre T2 de monter une salle de muscu perso ? Et pourquoi pas le home-trainer, vous dites-vous, dans un instant d’égarement ? L’Arrière-Cuisine est là pour vous guider dans cette pratique (ou plutôt loin de cette pratique, parce qu’on vous veut du bien).
Avant de choisir son matériel, il faut déjà savoir un peu de quoi parle-t-on.
Un home-trainer, ou vélo d’appartement, rouleaux et autres variantes, permet de pédaler comme si l’on était sur une bicyclette, mais sans se déplacer. Voyons ensemble les particularités de chacune des familles de matériel.
Le home-trainer
Le plus courant et pratique, c’est le home-trainer. Un bête système qui permet de surélever et fixer l’axe de la roue arrière d’un vélo normal, puis de mettre en contact de votre pneu avec un rouleau qui le freinera et vous forcera à appuyer sur les pédales. Une fois terminé, vous l’insultez un peu, le repliez et le rangez dans votre placard.
L’objectif réel du cycliste n’étant pas de pédaler vite et longtemps mais de dépenser le plus d’argent possible dans du matériel toujours plus compliqué, il existe une infinité de variantes toutes plus chères les unes que les autres, avec capteur de puissance, liaison avec l’appli smartphone et supplément olives. Si vous voulez conserver des relations cordiales avec vos voisins du dessous ou avec votre compagnon/compagne, ne pas prendre le bas de l’entrée de gamme qui imite à merveille un lave-linge en mode essorage en terme de bruit et vibrations.
Le vélo d’appartement
Moins pratique parce que ça prend bien plus de place. Vous les trouverez essentiellement dans trois endroits :
- Dans les salles de muscu. Ca sera la version technologie Blade Runner, avec son écran qui propose 184 séances d’entrainement différentes, de la difficulté progressive, du fractionné et une simulation de l’ascension du Ventoux, mais sera principalement utilisé par des femmes qui feront une dizaine de minutes à 60 tours/min sur la deuxième difficulté avant leur séance de squats.
- Dans le garage de Papy, sous une bâche. Ca sera la version technologie Retour vers le Futur, une selle branlante et un cadran avec une résistance graduée entre 1 et 6. Un autocollant lui donnera un nom qui sent bon les années Véronique et Davina. Au bout de quelques années, ce modèle migrera vers le troisième endroit, son cimetière des éléphants.
- Dans les brocantes. Une étiquette « 30€ » accrochée à la selle, « la sangle est cassée mais c’est pas dur de la changer » vous assurera son vendeur. Vous serez tenté de le négo 20€, c’est une mauvaise idée, même quand pandémie rime avec pénurie.
Les rouleaux
Non. Non non non. Non non non non non. Soit vous êtes un vrai cycliste et dans ce cas je ne sais pas ce que vous foutez sur cette page, soit les rouleaux ne sont pas une option envisageable, sauf si votre petit plaisir perso c’est de vous prendre le coin de la table dans la tempe.
Precautions à prendre :
Mais si le home-trainer apparaît comme une activité de dernier recours, c’est bien parce qu’il faut avoir épuisé toutes les autres options pour s’y résigner. Car si vous trouvez que courir ou faire du vélo est normalement bien peu passionnant (dans le cas contraire faites-vous soigner), sur un home-trainer vous n’avez même pas de changement de décor. Vous êtes immobile dans votre salon, vous infligeant si ce n’est de la douleur au moins de l’inconfort. Vous pédalez dans le vide, petit coup d’oeil sur la montre, erf ça fait que 5 minutes et 10 secondes, allez allez, courage, je regarde pas avant un petit moment, allez allez ça doit faire au moins 12 minutes là non ? Quoi ?? 5 minutes 34 secondes ???
De plus, contrairement à une boucle en extérieur, ou encore mieux un aller-retour, qui vous impose un itinéraire plus ou moins fixe puisqu’il va bien falloir rentrer, vous êtes déjà chez vous. Il suffirait de descendre de la selle, et tout serait fini ! Certaines personnes prétendent « bien aimer le home-trainer, non vraiment ça ne me dérange pas ». Vous êtes face soit à un menteur, soit à un pervers.
Certes il y a la possibilité de regarder des vidéos pour passer le temps (ce qui est en fait presque une obligation). Mais ne vous imaginez pas que ça va être l’occasion pour vous de rattraper les heures de visionnage en retard de votre série favorite : si vous appuyez un tant soit peu sur les pédales, vous sortez tout à fait du contexte agréable qui amène votre détente habituellement. Vous êtes moins concentré, calme, pas vraiment en mode « Netflix and chill » (bien qu’on puisse parler de « sport de chambre », si c’est là que se trouve votre engin) et risquez donc de passer à côté de votre divertissement, surtout si c’est un peu lent ou cérébral. Permettez-moi du vous recommander plutôt des contenus légers et rythmés, type sitcom ou sport.
Autre avertissement : la transpiration. Les activités cardio sont celles qui font produire le plus de transpiration. Alors si vous retirez tout flux d’air, préparez-vous à dégouliner tel un morceau de comté oublié au soleil en plein mois d’août. Ventilez si vous le pouvez et n’hésitez pas à sacrifier une serviette au sol. Pour remplacer l’eau perdue, buvez avec la cadence d’un supporter anglais devant son équipe favorite.
Un dernier conseil : pensez à inspecter votre pneu avant la session. Pour que votre effort soit un tant soit peu réaliste, le home-trainer appuoe très fort sur votre roue, y compris sur le petit bout de verre qui y est logé. Certes, crever chez soi est moins pénible que à 50km de toute civilisation pile le jour où vous avez oublié votre pompe, mais le courage nécessaire pour remonter et finir la séance de home-trainer après avoir changé sa chambre à air correspond à celui d’une étape de montagne du Tour derrière 2 Slovènes chargés jusqu’aux oreilles quand on a pris une commotion cérébrale dans la matinée.
Le monde d’après :
Vous rangez le home-trainer dans son placard et jurez ne plus jamais le retoucher. Vous bornez plus que jamais, trouvant même du charme à cette zone industrielle. Ah, le petit frisson d’entendre une voiture arrivant à toute allure derrière vous, le suspense « va-t-elle se décaler ? » vous avait tellement manqué !
Et puis un soir de février, à 19h, alors qu’il pleut dehors, vous vous dites que peut-être, votre petite sortie pour tourner les jambes, ça serait pas si mal de la faire à la maison, non ?
Une réflexion au sujet de « Tuto sport — Le home trainer »