Jeux vidéo — Night Call

Notation : 

Enquête policière qui tient la dragée haute à 99 % des productions audiovisuelles : +++++

Pouvoir prendre le taxi de nuit dans Paris sans avoir à vendre d’organes pour payer : ++++

Une histoire de taxis dont le scénario n’est pas rédigé par Luc Besson : +++

Pouvoir transporter un éditorialiste savant mélange d’Éric Zemmour et de Laurent Alexandre : ++++++

 

L’histoire : 

Night Call est un jeu d’enquête disponible sur PC qui nous place dans la peau d’un chauffeur de taxi parisien. D’accord, dit comme ça, cela n’a rien de très glamour mais très vite les choses s’emballent. La Ville lumière vit en effet dans la peur depuis qu’un tueur en série a fait son apparition. Celui que l’on surnomme le Juge défouraille à tout va et finit même par vous agresser, vous laissant quasiment pour mort. La police s’intéresse alors à votre passé et finit par se dire que vous feriez un excellent indic, vous qui passez vos nuits à transporter des clients bien informés. Dès lors, vous passerez votre temps à discuter avec chaque passager dans le but d’obtenir des infos et faire avancer l’enquête. Au terme de vos longues escapades nocturnes, vous rentrez dans votre petit studio et examinez les indices recueillis, progressant pas à pas, jusqu’à découvrir la vraie identité du tueur.

Histoires tragiques, atmosphère tendue, volcanique.

Points forts : 

  • Les discussions avec les clients s’avèrent passionnantes et très diversifiées. Du SDF au mec bourré en passant par le DJ raté et la journaliste secrétaire de rédaction, les auteurs ont su retranscrire les problématiques de chaque personnage. La palme du meilleur passager revient au candidat de l’Amour est dans le pré revanchard que vous amenez à la boîte de production à qui il compte réclamer des comptes après être devenu la risée du web. Simple en apparence, le jeu exige toutefois de la délicatesse dans vos choix. Si vous posez de bonnes questions, l’enquête avancera et tout ira pour le mieux. Mais si vous devenez lourd, votre passager peut mal le prendre et ne pas vous donner de pourboire. Vous risquez alors le licenciement et le game over car votre entreprise est déjà mise à mal par Uber, les trottinettes électriques et la chienlit socialo-bobo-communiste.
  • L’ambiance du Paris des années 2010 est bien retranscrite. Le design est minimaliste mais plutôt sympa et donne à voir différents monuments emblématiques. Mais c’est surtout dans les dialogues que les problèmes de la capitale sont abordées. Les attentats de 2015 ne sont jamais bien loin. La question de l’immobilier est également présente et des clients font part de leurs difficultés pour se loger. Le héros qui passe ses nuits à bosser et rentre dans son appartement minuscule ne semble pas mieux loti. De nombreuses autres questions sont abordées au cours de ces longues nuits d’échanges où les clients révèlent leur solitude et leur tristesse au chauffeur. Une mère de famille qui s’occupe de son fils rugbyman dans le coma, une jeune femme promise à un mariage forcé, un pervers narcissique qui se rend à l’aéroport pour draguer des femmes en détresse… S’il s’agissait d’un film, Night Call pourrait peut-être tenter sa chance au prochain Festival de Cannes. Ce qui permettrait d’ailleurs aux organisateurs de ne pas inviter Jacques Audiard et les Frères Dardenne pour la douzième fois en quinze ans.
  • L’intrigue policière s’avère assez solide et tient en haleine sur plusieurs heures. C’est d’autant plus fort qu’elle s’intègre parfaitement bien dans l’univers parisien et sa géographie. Cela n’avait rien d’évident et il suffit de regarder les polars régionaux de France 3 pour s’en convaincre. Même l’excellent Meurtres en Lorraine qui met en vedette Stéphane Bern ne parvient pas à rivaliser.

 

Points faibles : 

  • L’aspect gestion de l’entreprise est presque superflu et plutôt mal foutu. Quel intérêt peut-on trouver à aller faire le plein de son taxi en plein moment de tension par exemple. Risquer le game over parce qu’on a mal parlé à un client odieux peut également agacer.
  • On note quelques bugs un peu gênants sur la map qui perturbent la progression et nous sortent un peu de l’enquête.
Pouvoir discuter d’égal à égal avec un éditorialiste télé climatosceptique, vous en rêviez, Night Call l’a fait.

Le Saviez-vous : 

Le jeu est développé par les Lyonnais de Monkey Moon, preuve du dynamisme de la ville qui compte de nombreux studios indépendants et un maire qui assure secrètement le doublage VF d’Homer Simpson.

 

Ce qu’il faut en retenir : 

Votre chauffeur de taxi ne se contente pas d’écouter Éric Brunet sur RMC, il est peut-être aussi un informateur de la police.

 

Les conditions idéales pour jouer :

Sur la banquette arrière d’un Uber.

 

Vous aimerez aussi : 

  • Les jeux vidéo narratifs avec de nombreux dialogues comme The Red Strings Club ou Papers Please.
  • Revoir Taxi Driver et tenter une petite imitation devant votre miroir.
  • Visiter Paris de jour, parce que la nuit ça fait un peu peur.

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